Haïti-Environnement : les iguanes d’Anse à Pitres bientôt regroupées dans un parc

Ces lézards aux yeux rouges sont constamment pourchassés par les habitants de la commune d’Anse-à-Pitres, dans le Sud-Est où des nids ont été retrouvés. Scientifiquement connus sous le nom d’iguanes, cette espèce de reptiles, en voie de disparition dans le monde, peut, selon des scientifiques, rendre d’énormes services à  l’environnement.

D’importance méconnue de la population, ces reptiles sont « vitaux » pour la biodiversité, indique Masani S. Accimé, médecin vétérinaire, stationnée à Anse-à-Pitres depuis 2009 pour suivre l’évolution de ces iguanes de types cyclura ricordii et cyclura cornuta, deux dès 9 espèces recensées à travers le monde.

Photo : Patrick Mackintosh Jean UN/MINUSTAH

Photo : Patrick Mackintosh Jean UN/MINUSTAH

Selon Mme Accimé, ces reptiles ont la capacité d’aider au reboisement du pays dont le taux decouverture végétale ne dépasserait pas les 2%. Car explique le médecin, après que leur estomac eut décortiqué certaines grains avalés sur leur passage, il est prouvé que les pépins qu’elles rejettent dans leurs excréments germent beaucoup plus facilement que tout autre. « Elles disséminent les semences et participent au reboisement », confie cette représentante de la Fondation Internationale des Iguanes (IIF), dont le  travail consiste à aider la population à comprendre que ces animaux ne sont pas dangereux  et « sans eux, la biodiversité sera privée d’un de ses éléments les plus importants».

« Jadis, je n’attrapais pas seulement les fruits de mer mais je chassais aussi les iguanes », regrette ce coordonnateur d’une association de pêcheurs, le pasteur Augustin Santana, qui contribue actuellement à la protection d’espèces endémiques retrouvées dans sa ville natale et côtière d’Anse-à-Pitres.

Photo : Patrick Mackintosh Jean UN/MINUSTAH

Photo : Patrick Mackintosh Jean UN/MINUSTAH

Cependant, ces efforts consentis par le gouvernement haïtien et des particuliers dans ce domaine, semblent loin de décourager la chasse aux iguanes dont la saveur et la valeur marchande sont bien connues, dans le Sud-Est, souligne le propriétaire d’un hôtel de Jacmel, qui, dans le temps, élevait un couple de ces reptiles.

Figurant dans la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), les iguanes sont effectivement parmi les reptiles en danger d’extinction vu leur faible population résultant de l’absence d’un environnement adapté à l’espèce c’est-à-dire l’absence de la tranquillité, de la chaleur et de la sécurité.

Sauver le peu qui reste

Au rythme alarmant où disparait cette espèce, le docteur Accimé croit nécessaire de créer une « réserve de faune municipale » qui, estime –t-elle, sauverait le peu de ces animaux qui reste dans la zone.

Photo : Patrick Mackintosh Jean UN/MINUSTAH

Photo : Patrick Mackintosh Jean UN/MINUSTAH

Une idée que partage Momplaisir Ylly, agent exécutif intérimaire (maire) de la commune, enthousiasmé par cette volonté de protéger la « forêt sèche de Bouraca » pouvant abriter les espèces endémiques telles des reptiles, mammifères, oiseaux et plantes qui ornent la biodiversité et protègent leur habitat.

Un espace, ‘’riche en biodiversité’’, où poussent déjà des plantes vicariantes d’importances médicinales en voie de disparition est identifié comme futur lieu de reproduction des iguanes, fait remarquer l’agronome Arsène Bastien, directeur départemental du ministère de l’Environnement dans le Sud’Est.

C’est donc dans cet esprit que des acteurs de la société civile, membres d’organisations étrangères et autorités locales ont opté, dans le cadre d’un atelier, pour la création d’une aire protégée à laquelle on donnerait le nom de ‘’Parc Cacique Henri’’.

« Contrôler la dégradation de l’habitat et la chasse des animaux dans les zones spécifiques et limitées, interdire la production du charbon de bois » dans la commune des Anse-à-Pitres, devraient faire partie des mesures visant à protéger la vie des espèces animales et végétales en danger, conseille le biologiste, Wesner Saint-Cyr.

Photo : Patrick Mackintosj Jean UN/MINUSTAH

Photo : Patrick Mackintosj Jean UN/MINUSTAH

Et, puisque tout est lié, comme l’estime le docteur Accimé, « ce que nous faisons aujourd’hui pour protéger les iguanes, aidera demain d’autres espèces » lance la chercheuse. Elle s’attend à ce que cette décision soit annexée aux accords paraphés en 2007 entre autorités cubaines, dominicaines et haïtiennes relatifs à la création d’un couloir biologique dans la Caraïbes entre leur trois pays.

Protéger l’environnement d’Haïti est aussi une bataille dans laquelle se sont engagées les Nations Unies notamment à travers l’UNESCO, le PNUD, le PNUE et la MINUSTAH dont le bureau régional du Sud ’Est a déjà accompagné plusieurs organisations dans les communes de Belle Anse, Grand Gosier, Thiotte et des Anse-à-Pitres via des projets à effet rapide ou  Qips (Quick impact projects).

UN/Haiti/Jean Patrick Mackintosh / Pierre Jérôme Richard